dimanche 22 janvier 2012

Hongrie : quelle terreur ?

Au risque de décevoir certains de mes lecteurs qui, dans un moment d’extrême fatigue esthétique, auraient pu prendre goût à l’ironie facile dans laquelle – avant tout par dégout devant l’unanimité de la presse occidentale dans ses nobles tâches de désinformation – j’ai rédigé mes notes récentes sur « l’arrière des lignes fascistes », je me sens maintenant – au moins provisoirement – obligé de renoncer à ce ton.

Parce que j’ai rencontré un homme sur lequel je ne voudrais pas ironiser.

J’ai rencontré un cinquantenaire anonyme – a priori citoyen hongrois, parlant en tout cas hongrois avec l’accent de Petite-Hongrie – semblable à des milliers, probablement des dizaines de milliers d’autres dans la Hongrie d’aujourd’hui.

Vers 15h30 samedi après-midi, sur un trottoir bordant le boulevard Andrássy, dans la masse déjà assez compacte qui se dirigeait vers la Place des Héros, point de départ de la « Marche pour la souveraineté hongroise », le quant-à-soi du quotidien des grandes villes avait déjà suffisamment cédé le pas à la communauté de facto des foules pour que je puisse lui adresser la parole sans me présenter, ni lui demander de le faire. Il n’a pas ressenti le besoin de me faire connaître son nom, ni au cours d’une conversation qui a pourtant duré une bonne dizaine de minutes, ni quand nous avons fort cordialement pris congé l’un de l’autre. Comme il a, en revanche, accepté de très bonne grâce d’être photographié de face, il me semble évident qu’il m’aurait aussi dit son nom si je le lui avais demandé.

Mais la particularité assez émouvante de cette rencontre, c’est justement cela : l’absence totale d’exhibitionnisme de ce manifestant, qui ne portait aucun signe distinctif (ni badge, ni autocollant, ni aucun élément vestimentaire connoté), qui, même après avoir découvert qu’il parlait à un étranger, probablement à « une sorte de journaliste », n’a pas du tout profité de l’occasion pour déballer un epos individuel lourd de frustrations personnelles ou familiales mises au compte de tel ou tel régime du passé, de telle ou telle minorité active etc.. Si bien que, au moment de se dire adieu, en dépit d’une curiosité bien naturelle, j’ai trouvé déplacée la question qui (sous forme d’une présentation mutuelle, selon l’usage hongrois) pointait sur mes lèvres. Il restera donc l’anonyme du boulevard Andrássy.

Tout au plus peut-on voir dans sa queue-de-cheval grisonnante le symbole d’une identification passée ou persistante à la sous-culture rock, ou au folk, mais ça reste une hypothèse des plus audacieuses pour l’interprétation d’un signe extérieur qui, dans cette partie du monde, constitue presque un phénomène générationnel.

Etant venu seul, de son propre aveu par les transports publics, il ne pouvait venir que de Budapest (d’un arrondissement périphérique) ou de sa grande banlieue. En dépit des allusions venimeuses de la presse internationale concernant des bus « gratuitement mis à disposition » pour le transport de Hongrois transfrontaliers et de provinciaux (1), il était par conséquent représentatif du sous-groupe le plus massif de cette manifestation : celui des habitants du grand Budapest, venus seuls ou en petits groupes d’amis, bien entendu à leurs propres frais, sans demander pour cela le moindre Forint à l’Etat Hongrois, à Zsolt Bayer ou « au milliardaire Gábor Széles » dont se gargarisent les agences de presse. A vue de nez, ce sous-groupe a dû représenter au moins le quart de l’effectif total des manifestants, qui je situe personnellement autour des 400 000 personnes.

Agissant seul, l’anonyme du boulevard Andrássy est politisé, mais hors-partis, et j’ai même pu déduire de ses propos un profond scepticisme face aux partis politiques en général, y compris le FIDESZ au pouvoir.

On pourrait donc le soupçonner d’être un « opposant de droite » du FISDEZ, c’est-à-dire un partisan du parti crypto-nazi Jobbik. Un détail piquant, tout à la fin de notre conversation, m’a convaincu du contraire ; voulant manifester ma sympathie, j’ai fort maladroitement choisi mes mots, en lui souhaitant, en guise d’ailleurs : Kitartást ! (signifiant : « tenez/tiens bon ! »). Il est alors revenu vers moi d’un air gêné, pour m’expliquer qu’il n’appréciait guère cette expression, qui avait en son temps (ignorance qui ne fait pas réellement honneur à ma culture historique) servi de slogan au mouvement pro-nazi des Croix Fléchées. M’excusant, j’ai remplacé mon souhait par : Bátorságot ! (« courage ! »). La suite de la note montrera à quel point ce second mot était, quant à lui, bien choisi.

Venons-en donc au point douloureux, qui justifie à lui seul cette note : ce qui chez lui, sur ce trottoir, a attiré mon attention, m’amenant à lui adresser la parole, c’est que la pancarte qu’il transportait (et ne brandissait pas encore puisqu’il n’avait pas encore atteint la manifestation) était emballée dans un sac de plastique vert opaque. A une centaine de mètres de la Place des Héros, je l’ai aidé à déballer sa pancarte, que j’ai ainsi pu photographier.

Interrogé, il m’a confirmé qu’il s’agissait d’une mesure de prudence en vue du trajet entre son domicile et le site de la manifestation (sécurisé par une présence policière discrète mais réelle), « parce que certains pourraient prendre ombrage du fait que je n’aime pas Gyurcsány » (2)

Ignorant le tracé exact de ce trajet, et n’ayant d’ailleurs qu’une connaissance schématique de beaucoup de quartiers de Budapest, il m’est impossible de préciser dans quelle mesure ses craintes étaient fondées, ou relevaient d’une inquiétude exagérée : à la rigueur, qu’importe !

Pourtant, le texte de sa pancarte ne mentionne même pas Gyurcsány, ni d’ailleurs aucun politicien (3), parti ou nom d’idéologie : rédigée dans un style satirique, c’est – à part la référence, plus typiquement centre-européenne, à la « patrie » – une pancarte assez typique du mouvement – désormais mondial – de révolte citoyenne contre la dictature mondiale de la kleptocratie financière, tel qu’on le voit ces temps-ci, fédéré tantôt par Anonymous, tantôt par le GIABO de Max Keiser, tantôt au sein du protéique mouvement Occupy.

Pour ceux qui en douteraient, je traduis le texte :


« offre d’emploi [avec mot-valise pouvant aussi signifier : « attente aux aguets »]

On recherche :

vendeur de patrie

pour un club d’Off-SHpORT [mot-valise : « sport » + « off-shore »]

préférence à :

dénigreurs de fonds [mot-valise : « dénigrer » + « investir »] et adorateurs de Mammon. »

Antiphrastiquement confirmée deux ou trois heures plus tard par l’un des slogans scandés par les manifestants (« nem félünk ! » : « on n’a pas peur ! »), voici pour moi, sinon objectivement la principale, mais en tout cas la plus choquante leçon de cette expérience marquante qu’à été ma participation à la Marche : les centaines de milliers de Hongrois venus manifester ce jour-là sont certes venus protester contre les ingérences occidentales, ou, pour beaucoup, pour soutenir (parfois sans réserves) le parti et l’homme au pouvoir ; mais beaucoup d’entre eux sont aussi venu pour se guérir de la peur qui leur tenaille le ventre depuis des décennies : la peur des rafles de l’après-1956, cachée dans le consensus hypocrite des années Kádár, puis endormie au milieu du vertige consumériste des années de transition, mais brusquement ravivée ensuite par les brutalités policières du régime Gyurcsány. Peur poussant même des racines encore plus profondes, dans une expérience bientôt centenaire de l’humiliation collective et de la mise en quarantaine, dont l’événement fondateur, le trauma initial reste le traité de Trianon, péché originel – et toujours sans repentance – de l’Europe d’entre-deux-guerres.

Daniel Cohn Bendit a donc bien raison d’aboyer en plein parlement européen que « des gens ont peur en Hongrie ». Il ne croit peut-être même pas si bien dire.

Oui : des gens ont peur en Hongrie. Non seulement de nombreux membres de minorités ethniques (4), non seulement des « intellectuels » (5), vaches sacrées de l’oligarchie, mais aussi une majorité de hongrois, « d’ethniques hongrois » (6), salariés et artisans, petits entrepreneurs, agriculteurs, apolitiques ou politisés uniquement par la peur : la peur des cartels qui, au-dessus de leur tête, décident du cours du forint (à la hausse quand ils ont « bien voté » ; sinon…confiscation de la maison !), du montant de la dette, de l’octroi des prêts (7) ; peur de l’UE où, en fonction des grands intérêts privés des grands pays (EDF, Auchan, Sodhexo, et leur représentant de commerce Nicolas S.), on peut et veut les obliger à renoncer à une nouvelle constitution dont pratiquement toutes les dispositions ont un précédent dans au moins un pays de l’Union ; peur, enfin, des chiens de garde locaux du néolibéralisme impérial, et de l’admirable know-how répressif et rééducatif qu’ils ont hérité… du totalitarisme soviétique ; peur, en d’autres termes, de Daniel Cohn Bendit lui-même et de « sa famille ».


NOTES :

1 : naturellement considérés comme des manifestants de moindre prix, qu’il est probablement fort aisé de masser dans des bus, un peu comme des animaux ; une publication de la « gauche » pro-impérialiste hongroise a même évoqué des « figurants payés » ; pour avoir suivi cette marche de plusieurs heures dans le froid mordant de Budapest en janvier, je dois dire que dans toute l’histoire du théâtre, on n’a jamais vu de figurants aussi convaincants…

2 : Ferenc Gyurcsány, riche « homme d’affaires » issu de la nomenclature de l’ancien parti unique, puis formé aux USA, premier ministre du cabinet le plus durable et le plus caractéristique de la période 2002-2010, période de violences policières et de prédation économique néolibérale sans précédent dans la Hongrie de l’après-1990.

3 : même si certains pourraient facilement se reconnaître…

4 : groupe ethniques dont la définition même est cependant fort problématique dans un pays monolingue où les familles n’ont généralement plus d’enracinement religieux ; massivement magyarisés depuis plusieurs générations, les tsiganes, par exemple, étaient représentés en grand nombre à la manifestation ; le sort des tsiganes marginalisés (qui ne semble préoccuper l’Occident que lorsque les Hongrois « votent mal ») me semble, en Hongrie, relever davantage de la problématique du lumpenprolétariat, donc de la pauvreté, que d’une problématique ethnique.

5 : quoique ceux dont la presse occidentale sonorise si puissamment les râles soient généralement ceux qui ont surtout peur de perdre des avantages souvent exorbitants dus à une allégeance partisane au régime précédent.

6 : à supposer que cette expression ait un sens, pour les raisons exposées dans la note 4.

7 : octroi de prêts soumis par l’UE à des conditions qui n’ont rien d’économique, comme le retrait d’un projet de loi sur…l’âge de la retraite des juges ! Pour l’oligarchie bruxelloise, qui se démasque au passage, il s’agit là de protéger l’impunité de leurs complices, les grands initiés locaux, en empêchant le renouvellement générationnel de la magistrature que souhaitait provoquer le FIDESZ au moyen de cette proposition de loi. Tout le reste (fiscalité inégalitaire, droit des femmes, liberté de la presse etc.), c’est tout juste bon pour les éditos de Libération

jeudi 19 janvier 2012

A l’arrière des lignes fascistes : voyage sous couverture à travers le Reich Magyar (III : photoreportage)


Mardi, 18h : J’ai maintenant commencé mon enquête, parcourant au péril de ma vie, et dans un froid de canard, la capitale du nouveau Reich Hongrois Non-Orthodoxe Populiste Fasciste (RHNOPF).

Les mots sont impuissants à décrire les horreurs dont je suis ici le témoin discret. Cohn-Bendit a donc bien raison : les lettres officielles de Barroso et autres procédures comminatoires ne suffisent pas – il devrait effectivement, en compagnie d’une délégation des Verts, du PES et d’autres démocrates néolibéraux, venir se rendre compte sur place, dans les usines, les banques opprimées, les centres commerciaux menacés de fermeture et les écoles maternelles pour se détendre un peu, ce qui lui donnerait en outre l’occasion d’être comblé de marques d’affection par la population locale, qui l’accueillerait sans aucun doute en libérateur.
J’ai donc recours à l’image pour tenter de laisser percevoir une fraction infime de l’atrocité ineffable qui m’entoure. Mon lecteur saura m’excuser de la qualité déplorable des clichés, généralement pris, compte tenu du risque, au moyen d’un appareil espion ayant l’aspect extérieur d’un préservatif à l’effigie de Jean-Paul II – pour flatter l’intégrisme catholique en pleine recrudescence sur les rives du Danube sans pour autant démentir le préjugé xénophobe selon lesquels les étrangers ne viennent à Budapest que pour baiser (alors qu’il y a plein d’autres choses à découvrir dans ce pays jadis sympathique, et notamment la goulasch-soupe, niquer, le vin de Tokai, la drague, la méthode Kodály et le sexe).

Au lieu de me confronter comme je m’y attendais aux difficultés bien connues du marché noir, mes raids d’approvisionnement m’ont révélé une vérité autrement angoissante : s’il se peut que l’Humanité se trompe légèrement en titrant, dans son édition en petit nègre facile, « Il y a la famine en Hongrie », c’est parce que les travaux de préparation du honteux isolationnisme économique hongrois sont bien plus avancés que quiconque ne l’aurait soupçonné à l’Ouest – même Florence Labruyère, pourtant capable, pour le compte de Libération, de suivre télépathiquement depuis Paris des manifestations en cours à Budapest. Le cliché ci-dessus, qu’on peut considérer comme une pièce à conviction, et que je m’empresserai – si je suis encore en vie et en liberté – naturellement de remettre à la délégation de D. Cohn-Bendit dès son arrivée sur place (NB : la photo, s’entend, pas les aliments) représente un choix de produits hongrois (tous bio ou traditionnels, sauf la salade iceberg) disponibles dans la première supérette venue, le coût total de ce panier étant de 2427 forints, soit 8€. Voilà à quelles turpitudes on arrive à force de mépriser le consensus de Washington et de précipiter dans la production de biens consommables des cohortes de jeunes adultes qui, avec un peu de drogue et un téléviseur, auraient pu vivre heureux sur des minima sociaux… Pour que mon lecteur saisisse bien le danger que cela implique : il suffirait qu’une loi prétendument sociale libère les salariés hongrois endettés du poids des intérêts usuraires prélevés par les banques autrichiennes pour que cette manne alimentaire parvienne à leur portée. C’est ce qu’on peut appeler un véritable attentat – terroriste comme aux heures les plus sombres du 11 septembre – contre la vie et la dignité des actionnaires de Danone, Nestlé, Unilever, Kraft etc. !


Catastrophé par cette découverte, hier soir, j’ai voulu noyer mon amertume dans la boisson. Là encore, dumping nationaliste omniprésent : aucun bon produit Heineken dans tout le bistrot, mais une pinte maximaliste (de 0.5l) de bière Pécsi se vend – en plein centre de Budapest ! – à 500 forints, soit 1,6€ ! Mais QUE FAIT le Haut Commissariat à la Concurrence ? Ne pourrait-on pas envisager une taxe européenne sur les produits locaux ? Comment, sinon, encourager la globalisation alors même que les coûts de transport tendent à augmenter, et ne cesseront pas de le faire avant la pacification du dernier iranien ?!

Mais mon répit aura été de courte durée : à peine installé avec ma bière, je vois le bistrot se remplir des membres d’une sorte de Ku-Klux-Klan local, dissimulant leurs slips paramilitaires sous des jeans d’allure occidentale mais – ce détail suffit à les trahir – accompagnés de musiciens dont aucun ne porte de rastas.

Saisi d’une violente envie de vomir devant ces manifestations de nationalisme nauséabond, j’ai néanmoins dû, pour ne pas me trahir, m’attarder encore un peu dans le bouge en question, et supporter le spectacle révoltant de leurs hymnes fascistes maquillés en chansonnettes folkloriques (dans le texte desquelles, comme par hasard, on ne trouve aucune allusion à l’homosexualité, à la zoophilie ou à l’indépendance des banques centrales…) :

Cruche rouge, vin rouge

Ce sera bientôt mon tour

Je bois mon vin j’embrasse m’amie

Avec qui je traverse ce siècle en haillons

(Remarquer les allusions antisémites, et la misogynie écœurante du terme « cruche »).

En dépit de mes efforts pour passer inaperçu en zyeutant exclusivement les femmes et en rétribuant d’un rire gras toutes les blagues de cul de la soirée, quelque-chose – probablement dans la retenue un tantinet efféminée avec laquelle je me frappe les mollets dans la danse de garçons à laquelle j’ai dû participer – a dû me trahir. Mis en alerte, les membres de la formation paramilitaire en civil – appliquant la stratégie de dissimulation/temporisation qu’on trouve aussi à l’œuvre dans le discours de Viktor Orbán à Strasbourg – ont commencé à mimer pour moi, tout en feignant de m’ignorer royalement, des danses tsiganes, qu’ils connaissent visiblement assez bien. Sans-doute ont-ils participé à des commandos tournants de garde des camps de concentration où ont dû être massés les véritables tsiganes du pays (ceux que j’ai vus en ville, et qui avaient tous l’air de manger à leur faim, et pas mal de smartphones en évidence, sont probablement des figurants collabos).


mardi 17 janvier 2012

A l’arrière des lignes fascistes : voyage sous couverture à travers le Reich Magyar (II)


Samedi, 21h : j’ai horriblement soif. Pas question de boire l’eau du robinet, qui doit être un véritable sirop de bromure et de tranquillisants (sinon, comment expliquer l’apathie de la population devant la disparition de tous ses droits démocratiques et la perte d’indépendance de la banque centrale ?) ! Je prends donc quelques milliers de forints, quelques euros pour le cas où il faudrait recourir au marché noir, et je sors dans l’espoir de me procurer une bouteille de jus de fruit ou d’eau minérale, a priori importés du Belarus ou de Corée du Nord. Tiens, à propos, quel genre de fruits consomme-t-on au Belarus ? – il faudra que je pose la question à ma collègue Florence Labruyère, de Libération, qui aura sûrement une réponse schématique à me donner si elle a séjourné au Belarus, voire extrêmement détaillée, si elle n’y a jamais mis les pieds.

A ma grande surprise, le magasin SPAR que j’avais repéré à l’angle du boulevard circulaire et de la rue Wesselényi n’est pas une simple décoration lumineuse : c’est un vrai SPAR, comme en Autriche, juste un peu moins fassbindérien, forcément. Probablement un magasin réservé à la nomenclature du FIDESZ ; pourtant, pas de contrôle d’identité à l’entrée ; un employé taciturne me barre le chemin, mais c’est pour me rappeler que l’emploi du caddie est obligatoire. A la caisse, curieusement, on me laisse payer en forints ; comment font-ils, dans ce cas, pour empêcher la populace affamée de venir dévaliser ces rayonnages bien garnis ? Tout simplement en vendant 2€ les 100g de jambon, comme à l’Ouest ? Je commence à me dire qu’un détail a dû m’échapper…

Je retrouve le boulevard Erzsébet et la morsure du froid. Mon pouls s’accélère quand je vois deux adolescentes tsiganes, en haillons, s’approcher de moi en diagonale, l’air conspirateur. Ont-elles flairé l’étranger ? Que faire si elles me demandent de les aider à fuir le pays pour gagner le monde libre ? Elles sont peut-être suivies. Et si c’était un piège ?

En fin de compte, les haillons, vu de plus près, sont des minijupes assez sexy, quoi pas vraiment de saisons, et ces pauvres analphabètes, n’ayant pas forcément conscience de vivre – surtout de nuit – les heures les plus sombres de l’histoire d’un autre peuple, voulaient juste me proposer, comme d’habitude, la pipe à 5000 forints et l’amour à 10 000. La pipe me semble un peu chère, et l’amour, à ce prix-là, c’est suspect.

D’ailleurs, comme tout occidental élevé dans les principes de l’impératif catégorique kantien et de l’indépendance des banques centrales, je suis profondément opposé à la vénalité, surtout quand elle implique un risque de MST que ma sécurité sociale française ne prendra pas forcément en charge, étant donné que cette année, j’ai pas réussi à payer la mutuelle, mais maintenant que je vais avoir ce papier super-brûlant à proposer au Monde, à Libération et à l’Huma, je sens que je vais reprendre du poil du gagnant, yeah man, je vais leur dénoncer leur race, moi, à ces magyars à la con, et, ensuite, s’ils se font priver de droit de vote dans la Commission d’Entérinement des décisions franco-allemandes, ben faudra pas pleurer, nazis de merde ! Si ça a marché pour Pierre Waline, pourquoi ça marcherait pas pour moi !

Revenu dans ma piaule, je branche mon laptop. Internet fonctionne, en réseau public gratuit (pour mieux espionner les contenus). Mon ex a encore uploadé des photos de vacance aux Canaries avec cette concentration anormale d’antimatière autour d’une Rolex qu’elle appelle « son nouveau mec », sous prétexte qu’il est grand et musclé. Je commence à regretter les péripatéticiennes du boulevard circulaire (soit péri-péripatéticiennes). Après tout, à 5000 forints la pipe… Oui mais, j’aurais quand même préféré qu’elles soient blanches. Enfin, je veux dire : hongroises. Pas par racisme, bien sûr (comment l’idée a-t-elle pu ne serait-ce que m’effleurer ?), mais juste parce que, tant qu’à profiter sexuellement de la détresse d’une jeune femme, autant qu’elle appartienne à une ethnie génétiquement destinée à l’oppression et à la violence, même si la génétique est une fausse science, et que cette ethnie n’existe même pas.

Faut dire que mon ex était blonde. Très blonde, même, platine… et curieusement, les poils de sa chatte, eux, tiraient sur le châtain. Ca devenait visible quand ils poussaient un peu, chose somme toute assez rare, comme elle se rasait souvent, ne laissant qu’un délicat quadrilatère que…. XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

Parcourant désespérément le studio à la recherche d’un kleenex qui n’existe pas (pourtant, ils feraient bien d’en constituer des provisions géantes, avant leur exclusion de l’UE !), je tombe en arrêt sur l’exemplaire du Monde que je lisais dans l’avion. Il est resté ouvert à la page de l’article de fond – voire de tréfonds – signé par Caroline Fourest, dont je reconnais, en marge du texte, la sympathique gueule de fouine. J’ai une grande sympathie pour les fouines, qui jouent un rôle très important dans la régulation à même le nid des populations d’oiseaux, un peu comme le FMI dans l’épargne mondiale. Cela dit, la comparaison a bien sûr ses limites : toutes les fouines ne sont pas titulaires d’un DESS en communication, ce qui explique peut-être que beaucoup ne scandent aucune opinion sur l’islam, le judaïsme, la famille, le monde et la Hongrie, et se contentent de puer.

Enfin, on dira ce qu’on veut du Monde, mais ça reste l’un des quotidiens nationaux les plus absorbants du marché papier. Mais une chose me turlupine : comme la nouvelle constitution hongroise définit le mariage comme « l’union d’un homme et d’une femme », ça signifie de toute évidence que leurs lois votées à la mitrailleuse doivent déjà proscrire les pratiques sexuelles homo-érotiques, l’amour entre hommes, entre femmes, peut-être même entre sociologues… et moi, là, en plein VIIe arrondissement de Budapest avec ma photo de Caroline Fourest toute gluante dans les mains…

Meeeeerde ! Là, si j’étais croyant – ou pire : chrétien –, il ne me resterait plus qu’à prier pour que les caméras probablement dissimulées dans le faux-plafond aient une mauvaise résolution. Sûrement des modèles soviétiques de récup… tant que le FMI ne leur verse pas leur tranche – de l’argent que la Roumanie et le Portugal doivent lui prêter, parce que ce mois-ci, il a eu une tuile et… bon, c’est compliqué –, ils ne risquent pas de se payer du matériel performant, c’est-à-dire occidental… à moins qu’ils ne l’importent directement de Chine ? Oh, Foutredieu ! On leur offre le GATT, et voilà ce qu’ils en font !

Mais comment peut-on être hongrois ?

lundi 16 janvier 2012

A l’arrière des lignes fascistes : voyage sous couverture à travers le Reich Magyar



Samedi, 13h30 : Atterrissage à l’aéroport de Ferihegy, récemment rebaptisé Franz List par le pouvoir fasciste, probablement pour donner le change en cherchant à faire passer la Hongrie pour une grande nation artistique européenne, sous prétexte de Bartók et autres Márai, mais bien sûr ça ne prend pas. Ce sont des sauvages venus des steppes sur leurs petits chevaux mongols avec leur beefsteak tartare attendri sous la selle, pour ceux qui avaient une selle, et seule l’intégration – au besoin, de force – dans l’Union EuropéenneTM peut à terme faire d’eux des êtres civilisés, aimant la nature comme Manuel Barroso et les enfants comme Daniel Cohn-Bendit, profondément, passionnément, libéralement.
Je suis un peu surpris de voir que l’aéroport n’a toujours pas été militarisé, et à vrai dire un peu déçu de ne pas retrouver le frisson du passage de la frontière roumaine dans les années 90, quand les gardes-frontière militaires sondaient le dessous des banquettes du canon de leur kalachnikov. Mais bon, après tout, le Reich Magyar existe depuis moins de deux ans, et les bombardements de l’OTAN n’ayant pas encore commencé. BHL n’est même pas sur place ! Il faut leur laisser le temps.
Comme j’ai emprunté un vol Swissair, les touristes sont pour la plupart suisses ; ayant d’abord cru qu’ils étaient tous en transit vers l’un ou l’autre des îlots de prospérité démocratique de la région (pour le tir au tsigane de basse-Slovaquie ou l’usage récréatif des enfants roumains), je constate avec effarement qu’ils sont presque tous encore là avec moi à attendre leur valise. Ils comptent donc eux aussi séjourner en Orbanistan ! C’est vrai que leur confédération s’obstine elle aussi à repousser les bienfaits de l’UE… je commence donc à soupçonner mes compagnons de voyage d’être des suppôts du souverainisme helvète, pour ne pas dire des complices potentiels du fascisme hongrois, qu’ils vont soutenir sous prétexte de bains thermaux et de goulasch-soupes aux violons, le tout en promotion grâce à l’offensive boursière internationale sur le forint… C’est trop injuste !
Ils s’embarquent naturellement tous dans un airport-shuttle à prix d’or, qui a entre temps dû devenir obligatoire pour les étrangers, mais je profite de ma connaissance du terrain et de la langue pour me glisser dans un bus de la BKV (la RATP de Budapest) au nez et à la barbe d’une surveillance policière certes invisible, mais probablement féroce.
Le malaise grandit dans cet autobus qui me mène dans le centre de Budapest : en dépit du tracé nettement prolétarien de cette ligne, la mine traditionnellement morne des passagers ne laisse rien paraître de l’état de terreur dans lequel vivent les Hongrois des classes populaires sous la férule du FIDESZ. Se douteraient-ils qu’un témoin étranger est assis parmi eux ? Aurait-on fait circuler des consignes ? C’est possible. Plusieurs d’entre eux enserrent négligemment de gros paquets de provisions, probablement acquises au prix de leurs dernières devises étrangères, au marché noir, et camouflées dans des sachets TESCO ou LIDL pour tromper la vigilance de la police économique.
A l’arrivée sur le boulevard circulaire du centre, le malaise devient déception : ni armes ni uniformes, aucun véhicule militaire. Les cadavres de mères tsiganes enceintes, de journalistes libéraux et de boursiers post-doc de la fondation Soros ont dû être traînés hors de vue pendant la nuit. En tout cas, je me dis que cette opération Potemkine a dû coûter cher en détergent : plus la moindre trace de sang ou de matière cervicale sur les trottoirs. On finirait pas croire que l’AFP exagère… Les « gens » (a priori, des figurants gestapistes déguisés en étudiants, badauds du samedi après-midi, certains même très habilement grimés en jeunesse suburbaine tsigane hip-hop) vont et viennent comme si de rien n’était. Evidemment, je ne suis pas dupe. Compte tenu de l’importance stratégique du centre, il fallait s’attendre à une mise en scène.
Le pouvoir a aussi dû sacrifier une partie des réserves stratégiques de pétrole pour procéder à des distributions permettant d’entretenir en plein effondrement économique l’illusion d’une circulation intense sur les principales artères de la capitale. Pris d’une quinte de toux, je l’attribue d’abord à un début de bronchite non sans rapports avec la température négative, avant de me raviser : c’est peut-être une réaction de mon organisme aux gaz d’échappement d’un pétrole mal raffiné… y aurait-il déjà des livraisons secrètes depuis l’Iran ?
Arrivé à l’appartement dont on m’a laissé les clefs, je peux enfin, sans éveiller les soupçons, vérifier, avec les sueurs froides qui s’imposent, le contenu de ma valise après les fouilles de la douane : les cinq paquets de sablés de Lu, les dix barres de Toblerone et le kilo de café Lavazza arabica sont bien là ; précieuse monnaie d’échange, ces petits trésors pourront m’aider à soudoyer des informateurs affamés, voire négocier mon exfiltration si jamais je suis repéré. Si tout va bien, en revanche, je pourrai les manger pour améliorer un peu l’ordinaire des 15 soupes japonaises déshydratées cachée dans le double-fond, et qui – à défaut de tickets de rationnement – sont censées assurer ma survie si jamais la convertibilité du forint était suspendue avant mon départ. J’en profite pour découdre la doublure de ma parka et en sortir une partie des euros et des dollars.
Il règne dans l’immeuble un calme suspect. Sous des dehors de week-end hivernal, on sent confusément la prostration d’une population garrotée par le pouvoir dictatorial qu’elle vient par inadvertance d’élire avec une majorité absolue des voix, encore mal remise du trauma qu’a dû constituer, pour ce petit peuple malmené par une longue histoire d’annexions, de déportations et de massacres, la perte d’autonomie de sa banque centrale. Dans l’appart d’à côté, une retraitée, probablement dépouillée elle aussi de son épargne privée durement constituée sous l’effet de directives UE contraignantes, regarde un feuilleton brésilien, bien fort, pour donner le change. Rien ne permet d’affirmer qu’elle sanglote en secret. Peut-être fait-elle partie des milliers de zombies manipulés par la propagande populiste du régime, qui ont fini par croire que l’Etat s’occuperait mieux de leurs retraites que les fonds privés confiés à la sagesse éprouvée du capitalisme boursier international. Pour eux, le réveil sera dur, quand pour ne pas mourir de faim, ils devront aller, au bord du Danube, repêcher les quignons de fougasses jetés depuis leurs péniches de croisière par des millions de retraités grecs et irlandais enrichis par les dividendes de leur épargne à la City de Londres…

lundi 2 janvier 2012

1956 RELOADED : infowar Hungary

Longtemps avant le Blitz médiatique lancé (pour des raisons d’urgence financière, dans le contexte de l’opération de spoliation-éclair lancée lors du Sommet de Bruxelles contre les fonds de réserve des banques centrales de l’UE hors-euro) en décembre dernier contre le gouvernement hongrois de V. Orbán, j’avais, dès l’été 2011, bruyamment refusé de me joindre à la campagne – à connotation puissamment « orange » – organisée contre ce même gouvernement au nom de la « liberté de la presse ».
Pour ne pas vexer divers amis à tendances gauchistes sensibles au charme de ce fétiche petit-bourgeois par excellence, je coupais court au débat, en leur expliquant qu’en l’absence d’opinions publiques arrivées à maturité civique, aucun pays postcommuniste n’a jamais eu de presse « libre » ou « indépendante » de masse, pas plus avant l’adoption du Médiatörvény hongrois qu’après.
Sans me dédire, je crois pourtant le moment venu de motiver mon refus de façon plus substantielle : au-delà de la possibilité de fonder de nouveaux titres de presse, la « liberté de la presse » ne peut ni doit constituer une simple extrapolation de la liberté (individuelle !) d’expression à l’entreprise médiatique qu’est, par exemple, un quotidien de presse écrite, pour les même raisons qui font que rien dans l’histoire du droit démocratique occidental ne justifie l’attribution de droits spécifiquement personnels (comme le vote ou l’opinion politique) à des personnes morales.
En d’autres termes : du jour où on confond « liberté de la presse » et « impunité de la diffamation politique » – comme c’est hélas le cas dans la plupart des pseudo-démocraties occidentales – la démocratie n’est plus qu’un vain mot : cette presse-là est « libre » (y compris de diffamer des Etats), parce que ses propriétaires (nationaux ou internationaux) pèsent plus lourd dans la décision politique du pays qui l’héberge que l’électorat dudit pays. Dans toute autre situation, dans tout pays voulant laisser une chance à sa démocratie, le mensonge politique patent doit être punissable, surtout quand il a pour support des médias de masse.
Quand le quotidien français Libération, sous la plume de Florence La Bruyère, annonce qu’au terme des dernières réformes constitutionnelles obtenues en Hongrie par la majorité des deux tiers dont dispose, constitutionnellement, le parti FIDESZ actuellement au pouvoir, ce même parti pourra, lors de prochaines élections, remporter « 75% des sièges avec 25% des voix » (en oubliant soigneusement de préciser que cette formulation repose sur un présupposé hautement inhabituel dans l’analyse électorale francophone : celui de calculer la « part de marché » d’un acteur électoral sur le total des inscrits, et non sur le total des voix exprimées), il pratique de toute évidence la désinformation dans la meilleure tradition du Völkischer Beobachter et de la Pravda. Or, cette conduite, aux termes de la législation française, à laquelle ce quotidien est soumis, est parfaitement légale, dans la mesure où elle ne relève ni de la diffamation personnelle (dans le système juridique bourgeois, un Etat, représentant de très nombreuses personnes, dispose paradoxalement de moins de droits qu’un individu isolé), ni des cas classiques d’incitation à la haine raciale (en dépit de l’énorme non-dit néocolonial que convoie ce mensonge grossier sur le sens de la démocratie qui habite l’électorat du premier parti de masse hongrois).
Si la démocratie doit avoir un quelconque avenir en Europe, tôt ou tard, au lieu de sermonner V. Orbán du haut de leur inconscience et/ou de leur duplicité, les élites progressistes des pays d’Europe occidentale devront suivre son exemple et rendre la propagande punissable dans l’intérêt de la liberté d’expression individuelle. Ce jour est naturellement extrêmement loin de nous, l’opinion occidentale gauchiste réussissant jusqu’à présent à vivre massivement dans un univers schizoïde où les multinationales sont réputées capables d’acheter des gouvernements entiers (pour leur faire avaliser des technologies OGM, etc.), mais sujettes à des scrupules bien inexplicables quand il s’agit de prendre le contrôle de groupes de presse…
Que faire en attendant le réveil ?
Eh bien, par exemple, documenter la criminalité journalistique en cours !
J’ai donc décidé de dresser cette liste des

Titres de presse participant à la campagne de diffamation oligarchique
lancée contre la Hongrie,

notamment :
A. par amalgame des thèmes sociétaux/civiques et économiques : le « truc » le plus grossièrement récurrent consiste à inclure (souvent dans la même phrase) la décision de ramener la banque centrale hongroise sous un plus strict contrôle démocratique dans des énumérations de « conduites déviantes » du gouvernement FIDESZ (en matière, notamment, de « liberté de la presse » et de pluralisme politique).
B. par amalgame FIDESZ/Jobbik : ici, « l’épice » la plus prisée est la nomination (potentielle – oublie-t-on systématiquement de préciser – et par une autorité municipale) à la tête d’un théâtre de Budapest (un sur plusieurs dizaines…) d’un écrivain et dramaturge de talent, par ailleurs connu pour cultiver un style parano-antisémite (à mon humble avis porteur d’auto-discrédit) à la Céline ; la municipalité en question étant de couleur FIDESZ, on présente allègrement cette nomination potentielle comme une nomination effective, et décidée au plus haut degré de la hiérarchie politique…
C. par copier/coller d’« information » de provenance non-identifiée comportant des jugements de valeur sur la politique du gouvernement hongrois ; la grande majorité des « correspondants » signant ces « articles » n’étant pas locuteurs du hongrois, leur « information » dépend énormément des propos (généralement invérifiables pour eux) des rares blogueurs hongrois qui écrivent en français (très souvent des intellectuels cooptés par les « fabriques à démocratie » de l’Ouest, déçus du dernier spoil-system administratif après avoir amplement profité des précédents, et hurlant par conséquent au loup) ; compte tenu de la quasi-simultanéité de parution des quotidiens (que je consulte sous forme électronique) et des posts de ces derniers, retracer la généalogie de ces intoxications relève le plus souvent du problème de l’œuf et de la poule. Mais il semble évident qu’une communication bidirectionnelle existe entre ces deux dimensions de la manipulation médiatique (le blogueur/activiste qui rentre d’une manif de trente personnes, écrit sans frémir « nous étions des milliers ce soir » à l’abri de l’impunité – légitime – qu’offre la liberté d’expression et le journaliste coopté d’un grand titre de presse qui va reproduire ses propos, sans toujours en citer la source…) – confirmant mon intuition récente de l’inanité du pseudo-clivage idéologique souvent décrit entre « médias Gutenberg » et blogosphère (cf. http://korkorezhau.blogspot.com/2011/12/regard-sur-louest-pourquoi-et-comment.html).
D. par appel non-motivé à l’ingérence politique dans les affaires hongroises.

HU : Az újságírói deontológiát megsértő, a magyar kormányt súlyosan rágalmazó és/vagy magyar belügyekbe való külső beavatkozásra hívó francia nyelvű újságok, csatornák, bloggok stb..

REMARQUES
*Sans réelle surprise, le titre le plus virulent et le plus dénué de scrupules est Libération, propriété d’Edouard de Rothschild et de BHL…
*Il va de soi qu’en dehors des déclarations officielles de V. Orbán ou de tel ou tel ministre (elles mêmes rarissimes, et nécessairement formulées dans la langue de bois gouvernementale), ces articles ne donnent à aucun moment la parole aux partisans du FIDESZ : on n’entend de bout en bout qu’un seul son de cloche !
*Comme elle signe une grande partie du matériel ci-dessous, le cas de Florence La Bruyère mérité une attention particulière : à lire son article ci-dessous dans Libération, on serait spontanément tenté de se la représenter post-adolescente, avec deux séjours estivaux à Budapest dans le cadre d’une université d’été sur fonds Soros, et un hongrois amplement suffisant pour commander un daïquiri en anglais au comptoir du Szimpla ; eh bien non : Florence La Bruyère est au contraire un vétéran journalistique des guerres yougoslaves, qui, il y a à peine un an et demi, signait encore, pour un magazine électronique d’ambiance plutôt altermondialiste, un article extrêmement sobre, plutôt bien renseigné et somme toute assez laudatif sur ce même gouvernement FIDESZ (http://fr.myeurop.info/2010/06/09/messieurs-les-banquiers-payez-165), implicitement (et fort judicieusement) présenté et comme révolutionnaire (faire payer les banques !), et comme assez efficace dans son conservatisme budgétaire. Entre temps, les révolutionnaires sont devenus de dangereux « populistes », et la même politique économique mène désormais l’économie hongroise au gouffre… Pour Libé, Florence La Bruyère est visiblement capable de retrouver ses yeux d’adolescente… d’adolescente néocon – s’entend…

Libération, Florence La Bruyère : http://www.liberation.fr/monde/01012379885-viktor-orb-n-ubu-roi-de-hongrie, A,B,C, à l’origine notamment du mythe des „75% des sièges avec 25% des voix”, mensonge éhonté reposant sur la confusion (pourtant rare dans l’usage francophone courant) entre votes exprimés et électeurs inscrits…

Libération, Benedek Varkonyi, http://www.liberation.fr/monde/01012379702-hongrie-l-extreme-droite-remonte-sur-scene, B

Libération, « S. Etr. », http://www.liberation.fr/monde/01012380607-viktor-orb-n-ferme-le-ban-pour-le-nouvel-an, A : c’est le texte le plus objectif de la série, et le plus récent ; le changement de masque (avec remplacement de l’épique précédente par un énigmatique « S. Etr. ») n’est probablement pas dû au hasard : le public de ce genre de superproductions n’aimant que les happy-ends, comme pour l’instant le cabinet Orbán « refuse sa démission » à Libé, on organise un « atterrissage en douceur », probablement en prélude à une courte trêve permettant de recentrer l’artillerie lourde sur d’autres objectifs immédiatement prioritaires (Syrie ?)…


FranceTV: http://www.francetv.fr/info/la-hongrie-poursuit-ses-atteintes-a-la-democratie_44667.html, A,C : techniquement, c’est probablement le pire de cette triste collection : article anonyme et sans source citée, avec des titres plus que partisans, et cette perle : « il a fait voter plusieurs lois qui marquent un recul de la démocratie. Vendredi 30 décembre 2011, il est même entré en conflit ouvert avec le FMI » ; de la véritable info de merde !

Le Parisien, Attila Kisbenedek : http://www.leparisien.fr/international/hongrie-une-serie-de-lois-adoptee-au-pas-de-charge-30-12-2011-1789773.php, A,D

20minutes.fr, Attila Kisbenedek : http://www.20minutes.fr/monde/850231-viktor-orban-isole-hongrie-sein-ue-face-usa-fmi, A,C

Sud-Ouest, Christophe Lucet : http://www.sudouest.fr/2011/12/30/peur-sur-le-danube-592682-10.php A,C,D

Le Monde : http://www.lemonde.fr/europe/article/2011/12/30/la-hongrie-adopte-une-loi-controversee-sur-sa-banque-centrale_1624457_3214.html, A, C, où le Monde devient notamment un fervent partisan du financement public des sectes religieuses...

Les Inrocks, David Doucet: http://www.lesinrocks.com/actualite/actu-article/t/74806/date/2011-12-29/article/hongrie/, A,B,C,D

Le Soir, Jean-Paul Marthoz : http://blog.lesoir.be/lalibertesinonrien/2011/12/28/hongrie-la-derive-du-pouvoir-lance-un-defi-au-parti-populaire-europeen/, B,C, où Marthoz administre notamment des leçons de christianisme au FIDESZ…

Hu-Lala, Vincent Baumgartner : http://www.hu-lala.org/2011/12/29/une-file-interminable-pour-une-distribution-de-nourriture-a-budapest/, A,C

RFI, Florence La Bruyère : http://www.rfi.fr/emission/20111223-hongrie-manifestation-contre-le-regime-premier-ministre-conservateur-viktor-orban, B („droite populiste”)

Le Point, « source AFP » : http://www.lepoint.fr/monde/hongrie-le-parlement-adopte-une-nouvelle-loi-electorale-tres-contestee-23-12-2011-1411997_24.php, C: titre présentant la loi comme « très contestée », sans que rien dans le corps de l’article (attribué à l’AFP) n’étaye cette affirmation.

L’Express, Marc Epstein : http://www.lexpress.fr/actualite/indiscrets/honteuse-hongrie_1063658.html, A,C : « premier ministre populiste »



Contre-exemples :

La Romandie, reproduisant un matériel AFP: http://www.romandie.com/news/n/_Hongrie_l_ancien_Premier_ministre_socialiste_interpelle_puis_libere231220111512.asp: sources et citations identifiées, précision de l’information (y compris dans les aspects peu réjouissants pour la pseudo-opposition : « Bien que le rassemblement n'ait attiré qu'une centaine de personnes ») ; il est particulièrement intéressant de comparer cette utilisation du matériel AFP avec celle du Point (ci-dessus) : à coûts égaux, l’un des titres informe, l’autre manipule.

Le Figaro, AFP: http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2011/12/30/97001-20111230FILWWW00302-hongriele-ps-puni-des-crimes-communistes.php: idem.

Lextimes.fr, Alfredo Allegra : http://www.lextimes.fr/5.aspx?sr=666#.TwBuJxyAJXt.facebook: quoique très probablement publié avec des intentions hostiles au gouvernement hongrois actuel, cet article de la presse juridique spécialisée (comme ceux de la presse financière spécialisée, et des presses spécialisées, professionnelles en général) reste informatif ; dans un contexte capitaliste, la presse professionnelle, dans laquelle l’objectivité constitue une qualité technique dotée de valeur marchande, constitue tout naturellement un bastion de l’information non-manipulée ; dans le domaine de la presse grand public, compte tenu du monopole existant, cette valeur différentielle n’existe plus.